Liaisons dangereuses au travail: licenciement du cadre ayant une relation intime avec une syndicaliste (mai 2024)

Contexte

En principe, les faits relevant de la vie personnelle d’un salarié ne peuvent justifier son licenciement, sauf si l’employeur prouve que cela constitue un manquement une obligation découlant de son contrat de travail. Que penser dès lors d’un cadre dirigeant d’une entreprise qui aurait une relation intime avec une autre salariée, elle-même syndicaliste dans l’entreprise? Dans un arrêt du 29 mai 2024, la Cour de cassation a estimé que le licenciement du Cadre dirigeant, au motif de la découverte par l’employeur de cette relation, constituait un motif valable de licenciement, et même une faute grave (Cass. soc. 29 mai 2024, n° 22-16.218).

Les faits et la décision des juges

Dans cette affaire, le cadre dirigeant occupait des fonctions de responsable de site, avec des responsabilités en gestion des ressources humaines et en sécurité ; il présidait notamment les différentes institutions représentatives du personnel. or, il avait noué une relation amoureuse cachée avec une autre salariée, elle-même titulaire de mandats syndicaux et électifs.

L'employeur, ayant découvert cette relation, a licencié le responsable pour faute grave. Le salarié a contesté ce licenciement devant les tribunaux, en vain ; les juges ont considéré le licenciement comme justifié au motif que a dissimulation de la relation intime, en raison des fonctions professionnelles du salarié, constituait un manquement à l'obligation de loyauté envers l'employeur. Ce manquement était suffisant pour justifier un licenciement, même sans preuve directe d’un quelconque préjudice pour l'entreprise.

Conséquences

C’est manifestement le risque d’un conflit d’intérêt, dissimulé par le cadre dirigeant, qui a motivé la décision de la Cour de cassation. En effet, les juges ont semblé estimer que la relation intime entre la syndicaliste et le cadre dirigeant pouvait potentiellement affecter le jugement de ce dernier ainsi que ses décisions professionnelles, notamment dans le cadre des réunions du CSE qu’il présidait ou dans les négociations sensibles où il représentait la direction face à une représentante syndicale avec laquelle il avait une relation. Le cadre dirigeant n’aurait ne pouvait dissimuler cette relation à l’employeur.

On pourrait critiquer cette décision et notamment la validation d’un licenciement pour faute grave, particulièrement violent, alors qu’il n’était reproché aucune faute professionnelle au cadre dirigeant et notamment aucune décision prise en faveur de sa compagne syndicaliste. La Cour de cassation semble aussi redonner de la vigueur à un concept que certains prétendaient abandonné : la lutte des classes. Non non, un cadre dirigeant ne peut fricoter avec l’ennemie syndicaliste impunément.

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